Insee Conjoncture Normandie ·
Juillet 2021 · n° 27Bilan économique 2020 - Normandie Des mesures de soutien nationales pour limiter les effets de la crise sur l’emploi
et le chômage en Normandie
La conjoncture plutôt favorable de 2019 s’est trouvée radicalement modifiée début 2020, avec l’émergence de l’épidémie de Covid-19 et la mise en place d’un confinement de la population.
En dépit d’une reprise entre le premier et le deuxième confinement, la Normandie perd plus de 12 000 emplois en 2020, soit une baisse de 1 % sur l’année, comme au niveau national. L’industrie et le tertiaire marchand sont les secteurs les plus touchés. Les départements de l’Eure, de la Manche, et du Calvados sont les plus impactés par la baisse de l’emploi. Concomitamment à cette baisse, l’année 2020 restera comme une année record en termes d’évolution du nombre de demandeurs d’emploi avec, en avril, une hausse mensuelle historique de 25 %. En fin d’année 2020, le nombre de demandeurs d’emploi était toutefois revenu quasiment à celui d’avant-crise. Les politiques de l’emploi ont été fortement mobilisées pendant la crise sanitaire ; la relative bonne résistance de l’emploi tient notamment au recours massif au dispositif d’activité partielle. Le taux de chômage normand, après de fortes variations au cours de l’année 2020, termine l’année en baisse sur un an, à 7,7 %.
Malgré la crise sanitaire, les créations d’entreprises atteignent un niveau record en 2020, avec plus de 28 500 entreprises créées en Normandie (micro-entreprises, mais aussi sociétés et entreprises individuelles classiques).
Mais la crise sanitaire a provoqué en 2020 une chute de la fréquentation touristique en Normandie, avec un secteur de l’hébergement et de la restauration très fortement impacté par les mesures prises pour lutter contre l’épidémie de Covid-19.
Les activités de transport ont également été très marquées en Normandie par la crise sanitaire, avec une baisse générale du trafic maritime, un effondrement du transport aérien de passager, et un recul de 33 % des immatriculations de véhicules.
Dans l’immobilier, les autorisations de construire des logements et les mises en chantier diminuent en 2020, avec une baisse moins importante en Normandie qu’au niveau national.
Au 1er trimestre 2021, l’emploi salarié progresse faiblement en Normandie (+ 0,1 %). Le nombre de demandeurs d’emploi sans activité (de catégorie A) diminue légèrement tandis que le nombre de demandeurs d’emploi de longue durée poursuit sa progression dans tous les départements normands. Au cours de ce même trimestre, la création d’entreprises en Normandie suit la tendance nationale (+ 8 % contre + 10 %).
Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2020 publiés par
l'Insee.
Retrouvez les bilans des autres régions ici.
Agriculture - Les mauvais rendements font les mauvais résultats de l’agriculture normande Bilan économique 2020
Élisabeth Borgne (Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt)
Pénalisés par les conditions climatiques, les rendements des principales cultures régionales chutent. La production laitière se stabilise en volume comme en valeur. Les impacts économiques de la crise sanitaire de la Covid-19 se font surtout sentir sur les productions de lin et de pomme de terre, ainsi que sur la production de viande. Comme au niveau national, le résultat de la branche agricole normande devrait reculer, sous l’effet principalement de la faiblesse du volume des productions végétales.
Insee Conjoncture Normandie
No 27
Paru le :08/07/2021
Les aléas climatiques maltraitent les cultures, la Covid-19 perturbe la commercialisation
L’année 2020 est marquée par les excès climatiques : trop d’eau en hiver, pas assez au printemps et en été, des températures élevées, supérieures aux normales de janvier à septembre. Les cultures souffrent de ces excès et affichent des rendements inférieurs aux rendements moyens quinquennaux. La baisse des surfaces accentue le repli des productions de blé tendre (figure 1) et de colza, respectivement - 23 % et - 17 % par rapport à 2019. La production de lin se rétracte de 10 % malgré la nette progression des surfaces. La fermeture de la sucrerie de Cagny dans le Calvados, et la pression sanitaire (jaunisse de la betterave) font chuter la récolte de betterave sucrière de 40 %. Seule la production de pommes de terre augmente par rapport à la précédente campagne, tirée par la hausse des surfaces (+ 9 %). Les récoltes des légumes de plein champ (carottes, choux) sont perturbées par le retour de conditions humides en fin d’année 2020.
tableauFigure 1 – Évolution du rendement en blé tendre en Normandie
Normandie | Département mini | Département maxi | |
---|---|---|---|
1990 | 76 | 64 | 82 |
77 | 70 | 82 | |
71 | 58 | 76 | |
65 | 58 | 68 | |
74 | 65 | 78 | |
1995 | 74 | 69 | 78 |
84 | 75 | 93 | |
74 | 68 | 76 | |
85 | 74 | 90 | |
82 | 72 | 86 | |
2000 | 75 | 64 | 82 |
72 | 63 | 76 | |
82 | 72 | 87 | |
77 | 66 | 84 | |
86 | 75 | 94 | |
2005 | 77 | 66 | 81 |
76 | 70 | 81 | |
69 | 53 | 76 | |
86 | 71 | 93 | |
85 | 71 | 91 | |
2010 | 82 | 71 | 92 |
80 | 72 | 93 | |
81 | 66 | 87 | |
82 | 71 | 89 | |
81 | 71 | 86 | |
2015 | 89 | 77 | 96 |
63 | 53 | 67 | |
84 | 75 | 95 | |
77 | 66 | 86 | |
90 | 83 | 98 | |
2020 | 76 | 64 | 84 |
- mini = mini des rendements des 5 départements normands.
- maxi = maxi des rendements des 5 départements normands.
- Source : Agreste - SAA - SAA provisoire 2020.
graphiqueFigure 1 – Évolution du rendement en blé tendre en Normandie
Soutenus par la demande internationale et une offre limitée dans l’hémisphère nord, les cours des céréales rebondissent en début de campagne (figure 2). Le cours du blé atteint 240 €/t FOB Rouen fin février 2021, soit + 30 % par rapport au début de campagne en juillet 2020. Le cours du colza s’affermit également face à la demande chinoise en soja liée à la reconstitution du cheptel porcin après la peste porcine en 2018. La perspective d’un léger déficit du bilan mondial en sucre oriente les prix à la hausse en début de campagne betteravière. La crise sanitaire de la Covid-19, avec la fermeture de la restauration hors foyer, impacte le marché de la pomme de terre dont les débouchés se réduisent. Les prix se rétractent de nouveau en 2020. La commercialisation du lin, quasiment entièrement transformé en Chine, est retardée par l’arrêt des filatures chinoises au printemps 2020. Au premier trimestre 2021, la commercialisation de la récolte 2019 n’est pas achevée et celle de la récolte 2020 n’est pas commencée. Dans ce contexte, le prix du lin est incertain.
tableauFigure 2 – Évolution des prix des céréales et oléagineux (indice base 100 en 2015)
Céréales | Oléagineux | Engrais et amendements | Énergie et lubrifiants | ||
---|---|---|---|---|---|
Récolte 2018 | janv.-19 | 114,3 | 95,1 | 96,9 | 110,9 |
févr.-19 | 107,6 | 94,0 | 96,7 | 115,3 | |
mars-19 | 103,1 | 92,6 | 96,1 | 116,6 | |
avr.-19 | 103,4 | 93,6 | 95,5 | 118,4 | |
mai-19 | 100,8 | 93,4 | 94,7 | 119,0 | |
juin-19 | 101,9 | 94,1 | 93,5 | 113,3 | |
Récolte 2019 | juil.-19 | 99,7 | 95,1 | 93,1 | 115,1 |
août-19 | 96,7 | 97,1 | 93,3 | 113,4 | |
sept.-19 | 95,1 | 99,7 | 93,0 | 116,8 | |
oct.-19 | 99,9 | 100,0 | 92,7 | 116,5 | |
nov.-19 | 101,0 | 101,5 | 92,1 | 116,6 | |
déc.-19 | 102,5 | 104,4 | 90,9 | 119,6 | |
janv.-20 | 106,5 | 105,8 | 90,3 | 119,0 | |
févr.-20 | 105,3 | 101,7 | 90,0 | 113,2 | |
mars-20 | 103,0 | 95,5 | 90,1 | 100,9 | |
avr.-20 | 106,3 | 95,3 | 89,8 | 92,3 | |
mai-20 | 105,2 | 96,3 | 88,6 | 92,5 | |
juin-20 | 102,3 | 95,1 | 87,0 | 96,3 | |
Récolte 2020 | juil.-20 | 105,5 | 97,8 | 86,4 | 98,1 |
août-20 | 104,3 | 99,2 | 86,3 | 97,4 | |
sept.-20 | 107,6 | 102,7 | 85,9 | 93,8 | |
oct.-20 | 114,8 | 105,5 | 86,1 | 94,9 | |
nov.-20 | 120,3 | 113,8 | 86,2 | 96,8 | |
déc.-20 | 119,3 | 114,7 | 86,6 | 100,9 | |
janv.-21 | 129,3 | 122,1 | 89,4 | 105,5 | |
févr.-21 | 131,0 | 128,3 | 93,9 | 111,4 |
- Sources : Insee (Ippap et Ipampa).
graphiqueFigure 2 – Évolution des prix des céréales et oléagineux (indice base 100 en 2015)
Le lait résiste aux perturbations des marchés
En 2020, la collecte laitière normande s’établit à 3,85 milliards de litres, en légère progression par rapport à 2019 (+ 0,5 % ; figure 3). Cette évolution est similaire à celle observée au niveau national (+ 0,6 %), mais en retrait par rapport à celle dans l’Union Européenne (+ 1,2 %). La collecte laitière augmente dans les départements de l’Orne, du Calvados et de la Manche et baisse dans l’Eure et surtout la Seine-Maritime (- 3,0 %). Le prix moyen payé aux producteurs normands se stabilise à 369 €/1000 litres (- 0,3 % par rapport à 2019). La consommation accrue de certains produits frais à domicile pendant le premier confinement, ainsi qu’une demande mondiale soutenue au second semestre permettent aux marchés des produits laitiers de résister à la récession économique provoquée par la crise sanitaire de la Covid-19 (figure 4). Les effectifs bovins diminuent en région comme au niveau national (figure 5). Les abattages totaux se replient légèrement en têtes mais sont stables en poids. Les cours des bovins viande se redressent en fin du premier semestre (figure 6) quand ceux des jeunes bovins, dans un marché saturé, se replient. La demande en viande de veau, consommée essentiellement hors foyer, est pénalisée par les confinements successifs. Les cours du porc, au plus haut en 2019, fléchissent en 2020. L’arrivée de la peste porcine en Allemagne bloque les exportations vers les pays tiers et perturbe le marché européen qui doit absorber les stocks des abattoirs allemands.
tableauFigure 3 – Évolution du prix du lait et des aliments pour vache laitière (indice base 100 en 2015)
Lait de vache | Aliments pour vache laitière | |
---|---|---|
janv.-19 | 109,4 | 98,1 |
févr.-19 | 109,2 | 98,1 |
mars-19 | 109,7 | 97,9 |
avr.-19 | 108,4 | 97,6 |
mai-19 | 108,0 | 96,6 |
juin-19 | 110,7 | 96,2 |
juil.-19 | 112,9 | 96,3 |
août-19 | 113,8 | 95,7 |
sept.-19 | 114,3 | 95,2 |
oct.-19 | 112,9 | 94,6 |
nov.-19 | 111,3 | 94,4 |
déc.-19 | 111,5 | 94,5 |
janv.-20 | 111,8 | 94,5 |
févr.-20 | 111,4 | 94,9 |
mars-20 | 108,9 | 95,2 |
avr.-20 | 107,1 | 96,1 |
mai-20 | 106,6 | 96,1 |
juin-20 | 107,3 | 96,2 |
juil.-20 | 109,5 | 96,0 |
août-20 | 111,6 | 95,7 |
sept.-20 | 112,2 | 95,7 |
oct.-20 | 112,0 | 96,5 |
nov.-20 | 110,1 | 98,8 |
déc.-20 | 110,5 | 100,1 |
janv.-21 | 109,9 | 101,6 |
févr.-21 | 110,2 | 104,4 |
- Sources : Insee (Ippap et Ipampa base).
graphiqueFigure 3 – Évolution du prix du lait et des aliments pour vache laitière (indice base 100 en 2015)
tableauFigure 4 – Livraisons de lait de vache à l'industrie (en millions de litres)
2019 | 2020 | Évolution 2020/2019 (en %) | |
---|---|---|---|
Calvados | 621,8 | 626,6 | 0,8 |
Eure | 223,5 | 221,0 | -1,1 |
Manche | 1 682,1 | 1 702,3 | 1,2 |
Orne | 702,0 | 716,1 | 2,0 |
Seine-Maritime | 598,7 | 581,0 | -3,0 |
Normandie | 3 827,9 | 3 847,0 | 0,5 |
- Source : Agreste - FranceAgriMer - EMLestim 2019 – 2020.
tableauFigure 5 – Cheptel bovin en région (têtes) en Normandie
2019 | 2020 | Évolution 2020/2019 (en %) | |
---|---|---|---|
Vaches laitières | 566 612 | 562 655 | -0,7 |
Vaches nourrices | 247 585 | 246 652 | -0,4 |
Total vaches | 814 197 | 809 307 | -0,6 |
Bovins de plus de 2 ans | 317 348 | 296 066 | -6,7 |
Bovins de 1 à 2 ans | 443 759 | 430 451 | -3,0 |
Bovins de moins de 1 an | 543 611 | 533 046 | -1,9 |
Ensemble espèce bovine | 2 118 915 | 2 068 870 | -2,4 |
- Source : Agreste - SAA - SAA provisoire 2020.
tableauFigure 6 – Évolution du prix de la viande bovine et des aliments pour gros bovins (indice base 100 en 2015)
Bovins de boucherie | Aliments pour gros bovins | |
---|---|---|
janv.-19 | 96,5 | 100,6 |
févr.-19 | 97,8 | 100,8 |
mars-19 | 98,5 | 100,9 |
avr.-19 | 98,7 | 100,7 |
mai-19 | 99,2 | 99,9 |
juin-19 | 99,0 | 99,6 |
juil.-19 | 98,3 | 99,4 |
août-19 | 97,7 | 99,1 |
sept.-19 | 97,7 | 98,6 |
oct.-19 | 95,4 | 97,9 |
nov.-19 | 94,5 | 97,9 |
déc.-19 | 94,8 | 98,0 |
janv.-20 | 94,8 | 98,1 |
févr.-20 | 95,1 | 98,6 |
mars-20 | 95,6 | 98,9 |
avr.-20 | 93,9 | 99,6 |
mai-20 | 95,8 | 99,7 |
juin-20 | 98,1 | 99,6 |
juil.-20 | 98,7 | 99,5 |
août-20 | 98,6 | 99,4 |
sept.-20 | 98,3 | 99,4 |
oct.-20 | 97,8 | 100,2 |
nov.-20 | 96,7 | 102,2 |
déc.-20 | 96,5 | 103,3 |
janv.-21 | 96,6 | 104,8 |
févr.-21 | 97,6 | 107,3 |
- Sources : Insee (Ippap et Ipampa base).
graphiqueFigure 6 – Évolution du prix de la viande bovine et des aliments pour gros bovins (indice base 100 en 2015)
Le volume, plus que les répercussions de la Covid-19, élément déterminant du résultat de la branche agricole
Au niveau national, selon les estimations de la commission des comptes de l’agriculture et de la nation réunie en décembre 2020, la valeur ajoutée brute de la branche agricole reculerait pour la deuxième année consécutive (- 5,4 % par rapport à 2019). Le manque de volume des productions végétales expliquerait l’essentiel du repli de la valeur de la production de la branche agricole. Parallèlement, les consommations intermédiaires évolueraient peu. En Normandie, les évolutions devraient être similaires, voire plus marquées compte tenu du fort recul en volume des productions végétales. Seule l’amélioration des prix en fin de campagne de commercialisation pourrait atténuer la baisse.
Pour en savoir plus
Borgne É., « De l’influence de la Chine dans les résultats de l’agriculture normande », Le bilan économique 2019 – Insee Conjoncture Normandie n°22, juin 2020
Commission des Comptes de l’Agriculture de la Nation (CCAN), « Ouvrir dans un nouvel ongletRapports présentés à la Commission des comptes de l’agriculture de la Nation : Le compte prévisionnel de l’agriculture française pour 2020 » - Session du 16 décembre 2020